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Dernières parutions
Les agonistes des récepteurs du GLP-1: Induisent-ils une sarcopénie ou une ostéopénie ?
Les agonistes purs du récepteur GLP-1 comme le sémaglutide ainsi que les agonistes hybrides (récepteur GLP-1 et GIP pour “glucose-dependent insulinotropic peptide”) induisent une perte de poids très importante (moins 15-20% après 1-2 ans) en cas d’obésité. Mais à l’arrêt, le poids corporel augmente à nouveau de manière tout aussi fiable. Des données récentes montrent que la masse corporelle dite maigre (“lean body mass”) diminue davantage que la masse grasse et qu’en cas d’arrêt, la masse grasse augmente de manière disproportionnée. Dans les deux cas, ce sont surtout les masses musculaire et osseuse qui sont réduites, ce qui est particulièrement préjudiciable en cas d’états ou de facteurs de risque de sarcopénie et d’ostéopénie. Il semblerait qu’un nouvel agoniste triple (récepteur GLP1 et agoniste GIP ainsi que glucagon, retratutide) n’ait pas cet effet ou l’ait moins accentué. Les mesures DXA permettraient de déterminer ces effets, à condition de disposer d’une étude dite de référence. Toutefois, à part l’arrêt du traitement, il n’y a pas de bonne alternative d’intervention. Il faut également déterminer par quel type de tissu se produit la prise de poids après l’arrêt de ces médicaments. S’il s’agit principalement de la masse graisseuse seule, ce ne serait pas une bonne nouvelle.
JAMA 2023, doi:10.1001/jama.2023.23141, redigé le 08.12.2023
Une nouvelle positive
Les séquences génomiques de 500’000
Des personnes rendues accessibles à la recherche biomédicale
Nous avons déjà évoqué ici à plusieurs reprises les précieuses observations réalisées grâce à l’analyse des données de la biobanque UK (United Kingdom), la plus grande au monde. Il s’agit d’un trésor de données biologiques, génomiques et de santé complètes concernant entre-temps quelque 500 000 Britanniques. Désormais, les données des génomes plus ou moins complets de ces 500 000 individus peuvent être analysées à fins de recherche sur demande dans le monde entier. Par génome, on entend tous les exons (c’est-à-dire les segments de gènes traduits en protéines) et les introns (qui régulent de manière multiple le mode et la fréquence de transcription des exons, mais qui ne sont pas eux-mêmes lus ou traduits). Dans la mesure où la base génomique britannique est également représentative d’une population suisse, cette base de données permet d’apprendre énormément d’informations sur les causes ou les modulations génomiques des maladies et bien d’autres choses encore.
Nature 2023, doi.org/10.1038/d41586-023-03763-, redigé le 08.12.2023
Cholécystolithiase non compliquée: Opérer par laparoscopie ou attendre ?
En règle générale, l’enseignement clinique est fait en cas de cholécystolithiase non compliquée : opérer par laparoscopie si elle est symptomatique (colique biliaire typique, durée > 30 minutes). En cas de cholécystolithiase asymptomatique, il faut toutefois procéder de manière conservatrice. Une étude récente remet toutefois en question la procédure invasive en cas de cholécystolithiase symptomatique non compliquée, du moins pour les 18 premiers mois (période d’observation de l’étude) après le premier événement : la qualité de vie et les épisodes douloureux, respectivement l’intensité de la douleur, n`etaient pas vraiment différents mais associés à des couts nettement inférieurs (1). Pourquoi les épisodes de douleur sont-ils aussi fréquents ou aussi intenses ? Ce n’est pas très clair, mais il est peut-être utile de rappeler que les patients (jusqu`à 40% d`entre eux) continuent à ressentir des douleurs importantes après une cholécystectomie (2). Il est également utile de rappeler qu’en cas de cholécystolithiase non compliquée mais symptomatique, les taux annuels de complications (cholécystite, cholangite, pancréatite, etc.) sont assez faibles, de l’ordre de 1 à 3 %, et qu’il n’y a donc ni pression ni nécessité d`intervention chirurgicale rapide (3). Nous attendons avec intérêt les résultats à 18 mois, ainsi que l’évolution du rapport coûts/bénéfices.
1. BMJ 2023, https://doi.org/10.1136/bmj-2023-075383,
2. Br J Surg 2016, doi:10.1002/bjs.10287 pmid:27561954,
3. Voir: BMJ 2001, doi:10.1136/bmj.322.7278.91 pmid:11154626 et Journal of Clinical Epidemiology 1989 https://doi.org/10.1016/0895-4356(89)90086-3 et Ann Int Med 1984, doi:10.7326/0003-4819-101-2-171 pmid:6742647, redigé le 09.12.2023
Connaissance en bref
Connaissances de base sur les chiens et le développement de la démence
• La demande de chiens en Suisse ne faiblit pas, ce qui a entraîné une explosion des prix des jeunes chiens et – fait préoccupant – l’importation de très jeunes chiots de l’étranger.
• Selon les sondages, la qualité de vie subjective des propriétaires de chiens était plus élevée pendant les (précédentes) vagues du Covid-19.
• Indépendamment d’autres facteurs sociaux et socio-économiques, la possession d’un chien était associée à une réduction prospective de 40% du taux de développement de la démence.
• La race du chien ne jouait aucun rôle.
• Les chats ne ralentissent pas le développement de la démence.
• Les auteurs ont probablement raison de supposer que l’effet inhibiteur sur la démence est en grande partie lié au style de vie exigé par la détention (correcte) d’un chien.
• La détention d`un chien présente aussi d`autres avantages pour la santé de son proprietaire notamment en ce qui concerne les maladies cardiovasculaires.
• En va-t-il de même pour les chiens? N`ont ils pas à subir des conséquences négatives à ce service de santé?
• Autre question intéressante: Les chiens ont tendance à imiter leurs “maîtres”. Comment réagissent-ils en cas de syndrome dépressif ou de burnout?
BMJ 2023, doi.org/10.1136/bmj.p2852, redigé le 03.12.2023
Quel est le diagnostic?
Une femme de 45 ans ne se sent plus en forme depuis environ 6 mois et se plaint d’une “mélancolie” accrue. Vous remarquez une rubéose faciale et des stries sur la peau de l’abdomen large de plus de 1 cm de diamètre en largeur. La tension artérielle est depuis peu élevée (150/91 mmHg), une prise de poids n’est pas décelable. Vous soupçonnez un syndrome de Cushing, ce qui est largement confirmé par l’augmentation massive de la sécrétion de cortisol (urine de 24h) et une augmentation du cortisol salivaire (à minuit). Mais vous remarquez également une concentration de potassium plasmatique de 2,3 mmol/L.
Quelle est la maladie la plus susceptible d’entraîner un syndrome de Cushing chez votre patiente ?
A. Adénome corticosurrénalien produisant du cortisol
B. Hyperplasie bilatérale de la corticale produisant du cortisol
Corticosurrénale
C. Carcinome bronchique à petites cellules
D. Adénome du lobe antérieur de l’hypophyse produisant de l’ACTH (maladie de Cushing)
E. Apport de bétaméthasone dans une préparation disponible sur Internet pour l’immunostimulation et dont la déclaration est lacunaire.
Réponse:
L’apport exogène (prescrit ou non déclaré) de glucorticoïdes synthétiques, supprime la production endogène de cortisol. Vos résultats de concentration élevée de cortisol excluent donc ce diagnostic. En règle générale, les adénomes ou hyperplasies corticosurrénaliennes produisant du cortisol ne provoquent pas d’hypokaliémie, du moins pas aussi marquée que dans le cas présent. Il doit donc s’agir d’un processus produisant de l’ACTH. L’ACTH stimule et augmente l’aldostérone, ce qui entraîne une perte rénale de potassium. La courte anamnèse chez cette femme typiquement préménopausée plaide en faveur d’une production paranéoplasique d’ACTH, dans le cas présent dans le cadre d’un carcinome bronchique à petites cellules nouvellement diagnostiqué. Dans cette maladie, on peut observer d’énormes quantités de sécrétion d’ACTH, une ostéoporose sévère peut apparaître en peu de temps (pas dans ce cas, cependant). La bonne réponse est donc la réponse C.
The Lancet 2023, doi.org/10.1016/S0140-6736(23)01961-X, redigé le 09.12.2023
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