- Symposium scientifique ” Vieillir en Harmonie ” en l’honneur du Professeur Christophe Büla
Ch. Büla effectua ses études de médecine à l’Université de Lausanne. Jusqu’en 1991, il poursuivit sa formation post-graduée dans le Département de médecine du CHUV, avec l’obtention d’un doctorat et de son FMH en médecine interne en 1988. De 1991 à 1994, il se spécialisa en gériatrie à l’Université de Californie à Los Angeles. A son retour, il fut nommé médecin associé au Département de médecine interne du CHUV et médecin responsable du Centre universitaire de traitement et réadaptation (CUTR) à la Clinique Sylvana, à Epalinges. Il obtient son FMH en gériatrie en 2000. En 2002, il obtint successivement les titres privat-docent et maître d’enseignement et de recherche. En 2003, il se vit confié la responsabilité de médecin chef de la nouvelle division de gériatrie et réadaptation gériatrique créée au CHUV. En 2007, il dut nommé professeur ordinaire et prit la direction du Service de gériatrie et réadaptation gériatrique du CHUV jusqu’au 31 juillet 2023.
Ainsi que l’a rappelé son collègue et ami, le Pr. Christophe Graf, chef du Département de Réadaptation et de Gériatrie des HUG de Genève, tout au long de sa carrière, Ch. Büla aura été fortement impliqué dans l’enseignement de la gériatrie, non seulement aux étudiants en médecine et aux médecins installés, mais aussi aux professions paramédicales (physiothérapeutes et infirmiers), ainsi qu’à l’Institut des sciences du sport de l’UNIL (ISSUL). Il fut également très engagé dans le développement de la gériatrie au niveau national, au sein de la Commission de formation de la Société professionnelle suisse de gériatrie, et au niveau international, au sein du Board de la section gériatrie de l’Union européenne des médecins spécialistes (UEMS) où il a représenté la Suisse.
Ch. Büla fut également très actif en matière de recherche, avec à son compte 246 publications référencées dans Pumed et, plus de 10 millions de fonds lui ont été octroyés à cet effet. Ses intérêts de recherche ont été focalisés sur la prévention du déclin fonctionnel chez les personnes âgées. C’est ainsi qu’il a conduit et participé à de nombreux projets visant à améliorer la détection et la prise en charge de syndromes gériatriques fréquents (chutes, démences, état confusionnel aigu) et de maladies qui influencent le processus de fragilisation dans différents types de populations âgées. Ch. Büla prit une part importante dans la mise en place de la politique cantonale vaudoise du vieillissement tout en ayant été co-investigateur de la cohorte lausannoise Lc65+ pour l’étude et la prévention de la fragilisation chez les seniors initiée en 2004.
Intitulé ” Vieillir en Harmonie “, ce Symposium de formation continue a eu pour but de faire le point sur l’avancée des connaissances et sur les défis à relever dans les divers champs de la gériatrie pour répondre aux besoins d’une population vieillissante sous les contraintes budgétaires et les ressources rétrécies en personnel. Réunissant 10 experts.es suisses et étrangers avec lesquels Ch. Büla avait valorisé de fructueuses synergies renforcées par des liens d’amitié entre leurs équipes.
Partant du concept de santé mentale représentant un continuum entre santé et maladie, le Pr. Vincent Camus, chef de Service de la Clinique psychiatrique universitaire de Tours, s’attacha à démontrer l’intérêt à préserver sa santé mentale en vieillissant par une dépistage précoce de ses facteurs de risque, aussi bien que de ses facteurs protecteurs, pour recourir à des mesures d’interventions pertinentes et efficaces telles que : conserver une activité physique régulière, opter pour une alimentation équilibrée, entretenir des liens sociaux, pratiquer des activités sources de plaisir, repérer les signes pouvant faire penser à des troubles psychiatriques ou neurodégénératifs nécessitant traitement.
Le Pr. Andreas Stuck, Senior consultant de la Clinique universitaire de Gériatrie de Berne, dressa un historique intéressant de l’évolution fort hétérogène de la Gériatrie dans les différents pays en Europe. Si bien des progrès ont été accomplis au cours de ces trois dernières décennies, le constat montre que bien des défis seront à relever mais qu’il existe aussi des opportunités, dans la formation et l’acquisition de compétences en soins gériatriques spécifiques dans les sous spécialités telles que gynécologie, cardiologie, ophtalmologie notamment.
Pour sa part, le Pr. Gabriel Gold, ancien Médecin-chef du Service de Gériatrie des HUG de Genève, releva toute l’importance à donner aux lésions microvasculaires en tant que pathologie cachée de la cognition chez la personne âgée et cible potentielle pour la prévention des démences. La détection de telles lésions précoces repose essentiellement sur les nouvelles techniques d’imagerie cérébrale, dont la valeur prédictive pré-mortem demeure cependant encore limitée par rapport à l’examen neuropathologique du cerveau.
Ce fut ensuite la Pre. Sylvie Bonin Guillaume, cheffe du Service de Médecine interne et de Gériatrie des Hôpitaux de l’Assistance publique de Marseille, qui présenta son travail d’experte sur l’intérêt du dépistage et de l’évaluation de la douleur chez les seniors souffrant de troubles de la communication verbale afin de ne pas les priver d’antalgie par méconnaissance. Grâce aux résultats de son enquête nationale française sur les Pratiques et Usages en Gériatrie et en Gérontologie (PUGG) de 2018, l’oratrice a montré quelles étaient les échelles d’évaluation de la douleur validées chez de tels patients et les pistes à suivre pour les traiter.
L’impact de la fragilité des seniors sur leur prise en charge par leur proche a été traitée par le Pr. Didier Schoewerdts, chef du Service de Médecine gériatrique du CHU de Namur. Fort des résultats d’études épidémiologiques, cet intervenant a pu conceptualiser la nature et le poids des composantes du fardeau des proches aidants. En identifiant les facteurs de risque de décompensation selon 4 axes, socio-éducatif, psychosocial, contextuel et de santé du proche aidant, des scores de risque ont été développé avec la mise en place d’une politique européenne de mesures visant à alléger la charge des proches aidants non rétribués. [https://apps.who.int/iris/bitstream/handle/10665/332495/Eurohealth-25-4-10-14-eng.pdf].
Dans l’idée de connaître la place qui est accordée à la philanthropie pour la qualité de vie des seniors, c’est à titre de Présidente de la Fondation Leenaards de Lausanne que Mme Brigitte Rorive-Feytmans s’est exprimée sur ce thème cher à sa Fondation depuis des années : ” Qualité de vie des seniors : que peut faire la philanthropie ? ” Pour y répondre, Mme Brigitte Rorive-Feytmans s’est référée aux définitions clés, allant de la philanthropie à celles des seniors, en indiquant que ceux-ci font partie d’une cause oubliée de la Philanthropie en Suisse au regard de ses domaines d’action. Toutefois, elle ne manqua pas de mentionner ce que celle-ci-peut faire, en soulignant que si la personne âgée n’est pas une cause en soi, c’est à la Philanthropie de jouer un rôle en clarifiant les enjeux de la pauvreté, de l’isolement, des conditions de la fin de vie et de la santé. En point final, elle décrivit l’évolution du domaine d’action ” Ages et Société ” de la Fondation Leenaards historiquement centré sur des projets de recherche permettant d’améliorer les connaissances et les conditions de vie des personnes âgées vers de nouvelles orientations centrées sur les liens intergénérationnels, la stimulation du vivre et de l’agir ensemble, ainsi que sur le lancement d’une initiative ” Solidarités locales “.
Fort de son humour communicatif, le Dr Martial Coutaz, chef coordinateur du Pôle de Gériatrie de l’Hôpital du Valais passa en revue des nouveautés en Gériatrie de l’année 2023, en ne manquant pas de citer les bénéfices des habitudes de vie saine démontrés dans les dernières publications scientifiques, en souhaitant que Ch. Büla, son collègue et ami, puisse bénéficier de ces résultats pour sa nouvelle vie de retraité en harmonie !
Accompagnée de deux musiciens émérites, la Pre. Dina Zekry, cheffe du Service de Médecine interne de l’âgé des HUG, a consacré son exposé sur le thème ” Musique et Santé “. En retraçant, en paroles et en musique, les parcours de vie autres que simplement tranquilles des Jazzmen américains de renom tels que Duke Ellington, Charlie Parker, Theolonius Monk, BB King, et Louis Armstrong, Dina Zekry a voulu nous démontrer qu’au vu de son curriculum vitae, Ch. Büla lui aussi, nous avait enchanté. Et d‘entonner en cœur avec l’Auditoire le ” What a wonderfull world ” en son honneur.
A l’issue de tous ces exposés, vint alors le tour de Ch. Büla de nous donner sa leçon “d’adieux” intitulée ” Peut-on mieux vieillir ? ” et de nous livrer ses réflexions sur ce sujet. Quand bien même, la Suisse se situe aux 1ères place de l’espérance de vie en bonne santé, avec une croissance annuelle de près de 3 mois, celle-ci s’est inversée pour la 1ère fois depuis 1950 en raison de la crise Covid 19 en 2021. Fort de ce constat résultant d’une surmortalité ayant affecté tout particulièrement les personnes âgée, Ch. Büla expliqua ce déclin de l’espérance de vie par la vulnérabilité des seniors consécutive à la multimorbidité qui croît avec l’âge et qui engendre un effondrement de leurs capacités fonctionnelles notamment vitales. Sachant que celles-ci peuvent être modulées par un ensemble de déterminants favorisant ou non un vieillissement actif, son plaidoyer fut alors orienté sur les atouts plutôt que sur les pertes affublant le vieillissement. Dès lors, il orienta son exposé sur les données scientifiques probantes des habitudes de vie protectrices de la santé valables à tout âge, en mentionnant leur gain d’espérance de vie en bonne santé à 65 ans. A titre d’exemple, celui-ci s’est élevée à 6.6 ans chez les femmes et à 9.5 ans chez les hommes en Suisse en 2017. Et de conclure en citant les bonnes raisons de ne pas craindre le grand âge si l’on évite les préjugés et prendre conscience que nous pouvons agir sur notre vieillissement. Il s’agit là des propos pleins d’espoirs qu’il s’efforça d’insuffler à ses patient.e.s tout au long de sa carrière professionnelle dédiée tout particulièrement à la réadaptation gériatrique. En terminant son exposé par des remerciements bien sincères à l’intention toutes les personnes qui se sont engagées à ses côtés, Ch. Büla s’est vu remercier par un tonnerre d’applaudissements suivis d’une chaleureuse et souriante ” standing ovation ” bien méritée.
Finalement, c’est à la Pre. Patrizia d’AMELIO, Médecin-cheffe, et successeure du Pr. C. Büla que revint l’honneur de prononcer avec brio les remarques finales de ce Symposium scientifique de formation continue. A n’en pas douter, celui-ci fut non seulement une réussite, mais le témoignage de bon augure de succès de la Pre. Patrizia d’AMELIO et de son équipe fort engagées dans la poursuite du travail et de la relève des défis du Service de Gériatrie et de Réadaptation gériatrique du CHUV.
Président de la Fondation Suisse Nutrition Santé
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